Cette « vache de mer » (le nom anglo-saxon du lamantin est le sea-cow !) a longtemps été prise par les marins des temps anciens pour une sirène ! Hallucinations dues aux trop longs moments passés en mer, légendes, mythologies, méconnaissance de l’animal, on a maintenant peine à croire que le lamantin ait pu passer pour une créature au corps de rêve !
Un mammifère pas comme les autres
De l’ordre des siréniens, le lamantin appartient au genre Trichechus et il est le seul représentant de la famille des Trichechidae, qui se caractérise, entre autres, par une nageoire caudale aplatie et sans squelette et uniquement composée de muscles.
Ses membres antérieurs sont dites « vestigiales » : elles sont munies « d’embryons » d’ongles, vestiges des temps anciens, qui maintenant s’apparentent plus à des nageoires en forme de palette qu’à des pattes.
Son gabarit massif – le lamantin adulte peut peser jusqu’à 800 kg et mesurer jusqu’à 5 mètres de long -, sa minuscule tête sans oreilles apparentes, ses petits yeux myopes et sa peau grise, épaisse et lisse (à l’exception de poils au niveau des lèvres) en font un animal maladroit qui se déplace lentement.
Mais ce qui fait la singularité de cet animal dans le règne des mammifère est qu’il ne possède que six vertèbres cervicales, au lieu de sept habituellement chez les mammifères.
La maison du lamantin
Trois espèces de lamantin existent, chacune étant définie par les régions où on le trouve :
- le lamantin du fleuve Amazone et de l’Orénoque en Amérique du sud et au sud-est des États-Unis,
- le lamantin des Antilles, présent entre les côtes antillaises, la Floride et le Golfe du Mexique,
- le lamantin d’Afrique de l’ouest tropicale (de la Mauritanie à la Guinée).
Le lamantin a aussi pour particularité de vivre dans des eaux marines, côtières ou fluviales (il rejoint souvent les lacs et les fleuves lors d’inondations qui, faisant monter le niveau de l’eau sur les terres, permet à l’animal de changer de milieu aquatique sans sortir de l’eau).
Il est herbivore et peut engloutir jusqu’à 50 kg de végétaux par jour, mais comme les plantes aquatiques ont un faible rendement énergétique, cela donne à l’animal un très faible taux de métabolisme qui fait qu’il ne pourrait pas vivre dans des eaux inférieurs à 20°C, d’où le fait qu’on ne le trouve que dans l’hémisphère sud.
De plus, les plantes qu’il consomme contiennent beaucoup de silice qui provoque l’abrasion de ses dents. Mais le lamantin s’en moque bien : ses dents repoussent régulièrement ! Personne d’autre que lui pourra se vanter, à la fin de sa vie (il vit une trentaine d’années), d’avoir encore des dents de lait !
Monsieur et madame Lamantin
Jamais vous ne croiserez sur votre route un troupeau de lamantins ! Ils vivent en groupes « instables » : la mère élève son petit (et, exceptionnellement, un petit lamantin orphelin qu’elle aura adopté) pendant près de deux ans et le père ne sera jamais loin, pour les protéger et les câliner – l’animal, qui est totalement inoffensif, adore les câlins ! -, mais la femelle pourra aussi décider de partir ensuite avec un autre lamantin. Pas de meute, donc, mais des petits groupes qui se font et se défont. Certains groupes vont parfois passer un moment avec un autre, mais cela n’est jamais éternel.
Une espèce menacée et protégée
Le lamantin a aujourd’hui disparu de certaines régions où on le trouvait autrefois. En effet, plus de lamantin à la Martinique, à la Guadeloupe, et sa population est devenue très rare en Floride.
Il y a plusieurs causes à cela :
- le braconnage et la chasse intensive,
- la pollution de l’eau : les produits toxiques déversés dans les eaux,
- la destruction de l’éco-système maritime par le déversement des eaux de refroidissement des centrales nucléaires : si la température de l’eau augmente rapidement, les plantes meurent et le lamantin ne peut plus se nourrir…,
- les barrages sur les fleuves et l’assèchement des marais empêchent sa migration saisonnière qui aide au renouvellement de l’espèce,
- la pollution humaine : beaucoup de lamantins sont blessés ou tués par les hélices des hors-bord ou par l’ingestion de sacs plastiques qui les étouffent…
Or, le lamantin est un animal utile pour l »homme et pour la nature :
- il peut nourrir beaucoup d’humains… Mais tout est affaire de quantité : pas la peine de le braconner ou de manger du lamantin pendant toute l’année, faute de quoi ce mets pourrait bien disparaître de nos assiettes… Et c’est exactement ce qui est en train de se passer.
- en broutant les plantes aquatiques des fonds marins et fluviaux, il nettoie les canaux d’irrigation, les empêchant de se boucher.